Roquefort
100 ans d’Appellation d’Origine Protégée, un siècle de fierté aveyronnaise
En 2025, le Roquefort célèbre le centenaire de son Appellation d’Origine Protégée (AOP), une reconnaissance qui a marqué l’histoire des produits du terroir français. Retour sur un siècle de tradition, d’innovation et de passion autour de ce fromage emblématique de l’Aveyron.

Le Roquefort est bien plus qu’un fromage : c’est une légende. Selon la tradition, sa création remonterait à l’époque où un jeune berger, ayant laissé son repas – pain et caillé de lait de brebis – dans une grotte pour suivre une jeune fille, le retrouva plusieurs semaines plus tard, bleui et fermenté par une moisissure naturelle : le Penicillium roqueforti. Ce conte, transmis depuis des siècles, illustre l’origine fortuite d’une révolution gastronomique.
Dès 1070, des textes carolingiens attestent de la fabrication et de la consommation du Roquefort. Ce n’est toutefois qu’au Moyen Âge que sa renommée commence à se structurer. En 1411, le roi Charles VI confère aux habitants de Roquefort un privilège unique : celui d’affiner leur fromage dans les caves naturelles du village, exclusivité qui sera renforcée par la suite par le Parlement de Toulouse en 1666.

Ces protections préfigurent les premières formes de ce que l’on désignera des siècles plus tard comme les « appellations d’origine ».
C’est le 26 juillet 1925 que le Roquefort obtient la toute première Appellation d’Origine contrôlée (AOC) jamais délivrée en France, bien avant même les vins. Ce cadre juridique protège non seulement le territoire de production, mais aussi les méthodes artisanales, les conditions d’élevage et d’affinage, et même la flore microbienne naturelle des caves. En 1996, cette reconnaissance est étendue au niveau européen sous le label AOP (Appellation d’Origine Protégée).
Les caves de Roquefort
trésor naturel et secret d’affinage
Sous le village de Roquefort-sur-Soulzon, creusées dans le flanc du Combalou, s’étendent des kilomètres de caves naturelles. Ces cavités, issues de l’effondrement partiel du plateau il y a des millénaires, offrent un microclimat d’une stabilité exceptionnelle, propice à l’affinage du Roquefort.
L’air y circule naturellement grâce aux « fleurines », des fissures verticales qui régulent température (environ 10°C) et humidité (près de 95 %). C’est dans cette atmosphère singulière que le Penicillium roqueforti — le champignon responsable du persillage du fromage — peut se développer de manière optimale.
Chaque fromager dispose de ses propres caves, où il affine ses fromages selon un savoir-faire transmis de génération en génération. C’est là, dans le silence et l’obscurité, que le Roquefort prend toute sa puissance aromatique. Ces caves ne sont pas seulement des lieux de travail : ce sont des cathédrales souterraines, symboles de patience, de précision et de patrimoine vivant.
Le Roquefort joue un rôle crucial dans l’économie locale, avec plus de 5 000 emplois directs et indirects liés à sa production. Il gère aussi un modèle agricole équilibré, où l’éleveur, le fromager et l’affineur sont interconnectés.
Mais le Roquefort, c’est aussi un marqueur culturel. Sa fabrication fait partie d’une identité transmise dans les familles, les villages, les paysages. Il est un produit de terroir au sens plein du terme : enraciné, singulier, et porteur de mémoire. Il incarne un rapport au temps long, à la nature et à la communauté.
Malgré son succès, le Roquefort fait face à des défis contemporains, tels que la concurrence internationale et les évolutions des habitudes de consommation. Les acteurs de la filière s’engagent donc dans des démarches de promotion et d’innovation, tout en préservant l’authenticité du produit. Des campagnes de communication visent à séduire une nouvelle génération de consommateurs, en mettant en avant les qualités gustatives et nutritionnelles du Roquefort.
Le centenaire de l’AOP Roquefort est l’occasion de célébrer un fromage emblématique, témoin d’un savoir-faire ancestral et d’une capacité à évoluer avec son temps. Il symbolise la richesse du patrimoine gastronomique français et l’importance de protéger les produits qui en sont les ambassadeurs.
Que les cent prochaines années soient à la hauteur de ce passé d’exception.
Les grandes dates de l'histoire du Roquefort
1070 : Première mention écrite du Roquefort dans des documents carolingiens.
1411 : Charles VI accorde aux habitants de Roquefort-sur-Soulzon un droit exclusif de production et protège les caves naturelles du massif de Combalou.
1666 : Le Parlement de Toulouse interdit l’affinage du Roquefort en dehors du village, renforçant ainsi la protection du savoir-faire local.
1925 : Le Roquefort devient le premier fromage à bénéficier d’une Appellation d’Origine en France.
1930 : Création de la Confédération Générale de Roquefort et de la marque collective « Brebis Rouge ».
1951 : Reconnaissance internationale du Roquefort lors de la Convention de Stresa.
1996 : Obtention de l’Appellation d’Origine Protégée (AOP) au niveau européen.
Pour marquer ce centenaire, de nombreux événements sont organisés tout au long de l’année 2025. Parmi eux, la troisième édition de « Roquefort en Fête » se tiendra les 7 et 8 juin à Roquefort-sur-Soulzon, avec des visites de caves, des dégustations et des animations pour tous les âges.
Un colloque dédié à l’histoire et aux enjeux du Roquefort a également été organisé à Paris le 20 mars, réunissant experts, producteurs et historiens. D’autres événements, tels que la présence au Salon de l’Agriculture à Paris du 22 février au 2 mars, l’accueil de l’assemblée générale du CNAOL à Millau les 25 et 26 septembre, et le festival des AOP à Paris du 14 au 16 novembre, ponctueront cette année exceptionnelle.