La musique en Aveyron, on la cultive pour le plaisir mais aussi pour se soigner. Jean François Labit, musicothérapeute ruthénois depuis plus de 33 ans l’utilise quotidiennement pour accompagner ses consultants vers le mieux-être.

Pour partir à la rencontre de cette pratique encore trop méconnue, Jean François a accepté de se prêter au jeu des questions réponses. Bienvenue à tous dans l’univers de la musicothérapie !

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Jean François Labit : la musique et le soin, un même combat ! (@Aveyronline.com)

Jean-François, pouvez-vous nous raconter votre rencontre avec la musicothérapie ?

A 18 ans après le bac, j’ai eu le concours pour faire mes études d’infirmier en psychiatrie au CH Ste Marie à Rodez. J’étais déjà musicien-chanteur dans des orchestres ou des groupes depuis l’âge de 15 ans avec une pratique musicale assidue. J’ai renoncé à faire médecine parce que cela me demandait de stopper la musique en étant pas sûr de réussir. Rapidement à l’hôpital de Sainte Marie, je me suis investi dans une chorale et un atelier de danses folkloriques pour les patients hospitalisés. C’est là que j’ai découvert les premiers bienfaits d’une activité à médiation musicale, l’intérêt d’un pas de côté dans un espace diffèrent de l’unité de soins pour les patients. De fil en aiguille, j’ai pu observer que la relation entre les patients et moi pouvait être légèrement différente : ils parlaient au musicien, pas à celui qui porte la blouse blanche et qui donne des médicaments. Une relation d’être humain à être humain sans masque s’instaurait. Cette dimension relationnelle m’a fait découvrir une autre manière d’accéder au sujet, à la personne bien au-delà de la symptomatologie. Peut-être peut-on évoquer une relation plus symétrique que complémentaire.

Comment définiriez-vous la musicothérapie ?

La Musicothérapie est l’utilisation « intentionnelle et adaptée » des propriétés de la musique : de la pulsation et du rythme, de la mélodie, de l’harmonie, des timbres, de la tonalité, etc. dans le cadre d’un projet de soins individualisé discuté avec la personne en demande soins et l’équipe pluridisciplinaire. Il s’agit d’une Thérapie complémentaire non médicamenteuse qui participe à la prise en charge de la personne de manière spécialisée. Les séances peuvent être en individuel et/ou en groupe selon les indications. Deux grandes techniques de musicothérapie existent et offrent des cheminements spécifiques : la musicothérapie dite réceptive, c’est-à-dire des séances où l’écoute musicale est au cœur des processus (écoute musicale/Parole, écoute musicale/Ecriture, écoute musicale-expression picturale, etc.). La relaxation en musique encore appelée « détente psychomusicale » a une place particulière en musicothérapie liée à ses spécificités et protocoles comme pour la gestion de la douleur ou l’accompagnement des troubles du sommeil, l’apprentissage de techniques pour mieux gérer le stress, …

Musique et insuffler le Vivant
Un musicien mais aussi un soignant pour toujours plus de sons, d’humanité et de bien être ! (@DR)

Quelles sont les indications de la musicothérapie ?

Il existe de très nombreuses indications en fonction des problématiques, les principales sont : tous les troubles de la communication et de l’expression notamment les troubles autistiques et la psychose, les problèmes en lien avec la confiance en soi et l’estime de soi, la dépression et ses troubles associés, les diverses situations de deuil, la gestion de la douleur, du stress, des troubles du sommeil, … Le développement de la réceptivité musicale et la mise en mots, toutes les formes d’expressions sonores, vocales et musicales liées à la créativité sont des pistes à privilégier. La musicothérapie ne connait que deux contre-indications : l’épilepsie musicogénique et l’amusie.

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Carline Cazor et Jean François Labit pour la présentation de leur CD « Musicothérapie et Sommeil ». (@DR)

Comment se déroule une séance type ?

Chaque musicothérapeute déploie le modèle qui lui convient en fonction du cadre et du contrat établi avec le/la patient(e). En règle générale, une séance de musicothérapie dure 50 minutes et se décline en trois temps : l’accueil et l’évocation du vécu entre les 2 séances et « Ici et Maintenant », la pratique de la technique de musicothérapie définie avec la personne, un temps de reprise verbale et d’échanges sur ce qui vient d’être partagé et vécu. Parfois, il y peut y avoir la prescription d’une tâche à réaliser entre deux séances. Les séances de musicothérapie dépendent donc de l’indication thérapeutique et de la commande, de l’élaboration du projet thérapeutique individualisé et du contrat thérapeutique avec la personne. Des évaluations sont prévues à « x » séances.

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Jean François lors d’une séance en ehpad.

Est-il possible de me dire une anecdote sur votre vécu de praticien ?

C’est difficile parce que j’ai une somme d’anecdotes savoureuses à raconter sur 33 ans de pratique en ambulatoire et en hospitalier. Je choisis aujourd’hui d’évoquer un travail effectué avec une jeune fille autiste qui m’avait été adressée par sa psychiatre parce qu’elle ne parle pas et communiquait peu avec ses proches, etc. : Au début des séances elle chuchotait à faible voix ce qu’elle souhaitait faire pendant la séance. Melle. Y adorait chanter sur des playbacks et chose extraordinaire : quand elle chantait, elle chantait à haute voix avec justesse. Son timbre de voix était joli et sa tessiture laissait augurer de belles possibilités.

Grâce à des techniques de musicothérapie active, Melle Y. a pu au début échanger en chantant donc sortir de cette posture de voix chuchotée-éteinte. Elle écrira petit à petit des textes en lien avec son vécu que nous mettrons en musique. Il s’agira ici d’un prétexte à la relation et à l’échange. Le cadre posé en Musicothérapie se voudra rassurant et permettra l’exploration de potentialités créatives. Parfois, un peu comme par magie, le fait de créer un espace transitionnel va favoriser l’ouverture de canaux psychosensoriels et permettre des mutations positives. Aujourd’hui, Mlle Y. a pu intégrer une école de musique et prendre des cours de chant. Elle participe à des karaokés et à un spectacle musical dans son institution. Cette anecdote illustre bien un des intérêts de la musicothérapie dans le cadre de la réhabilitation psychosociale. La musique peut être incitatrice et favoriser les échanges/les relations, inviter à élaborer un espace où peut s’exprimer la créativité de chacun.

Jean-François Labit et la musicothérapie.

Que diriez-vous à une personne qui hésite à se faire accompagner par la musicothérapie ?

Je dirai qu’il faut dépasser ses peurs de l’inconnu et oser à la découverte… Que chacun d’entre nous sommes sculptés par le sonore avant même notre naissance, au moins à partir du troisième mois, et que cela fait de nous des êtres sensibles aux bienfaits du son et de la musique. Il existe de nombreux chemins thérapeutiques, il est important de faire un choix en fonction de sa sensibilité, de la compétence du thérapeute et enfin des propositions de travail.

La musicothérapie dispose d’un océan de techniques pour des orientations différentes qui peuvent aller d’éducatives et rééducatives à psychothérapeutiques en passant par sociothérapeutiques,…

Il est important de se rappeler la commande et les attentes de la personne en demande et les réponses adaptées à mettre en place avec le média qu’est la musique.

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La musique, c’est la vie, la joie et la découverte de soi, Jean François est à la manoeuvre !!! (@DR)

Pour plus de renseignements : jflabit@orange.fr

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