PARCOURS PERMANENT STREET ART MUR MURS

Le Street Art fait désormais partie intégrante du paysage urbain de Decazeville. 
Organisé par le service de l’action culturelle et sociale de
la Communauté de communes, le parcours street art appelle à déambuler d’œuvres en œuvres à la découverte de 23 fresques murales monumentales ! Une manière originale de (re)découvrir la ville de Decazeville, devenue musée à ciel ouvert ! Unique en Aveyron, savourez cette petite balade au coeur de l’art urbain pour en prendre plein les yeux. Rencontre avec son parrain : Jo Di Bona

Jo Di Bona, parrain du festival Mur Murs est l’une des principales figures du street art dans le monde, revient sur son parcours, la musique, le street art, et l’énorme émotion ressentie à Decazeville.

Jo Di Bona by ©Alexandre Gallosi 1
© Alexandre GALLOSI

Dans sa voix un sourire que les yeux ne démentent pas. Jo Di Bona est ouvert. Patient, prend le temps de s’expliquer. Et pourtant il pourrait jouer les vedettes ; l’accessibilité est la signature des grands. Les débuts ? Il est né il y a une quarantaine d’années à Montreuil-Sous-Bois. 93. Une enfance tranquille et un désintérêt pour l’école. A deux doigts d’arrêter après la 3ème. Un coup de chance va bouleverser son destin de cancre : « Ma mère m’a fait intégrer le lycée Albert Schweitzer du Raincy. Section A3, lettres et arts plastiques… Depuis mes 12-13 ans je me passionnais pour le street art. A l’époque c’était la scène new yorkaise hip hop, JonOne, Dombi, Seen… A Paris c’était Nasti, Bando… nous, dans le 93, on faisait pareil : graffitis, rap et break-dance associés. Comme tout le monde, on a commencé par des graffitis sur les murs, en vandales, comme on l’avait vu dans Colors, le film de Dennis Hooper, une claque, une révélation pour plein de gamins… Pour moi c’était assez naturel, mon père étant graphiste, j’avais accès à ses feutres et je ne m’en privais pas. Le grand déclencheur a été le lycée : les classes d’arts plastiques et de musique étaient voisines, il s’est créé une belle émulation entre les deux, et il y avait des bons chez les musiciens, les deux frères du ténor Roberto Alagna, en particulier. Dans ma classe il y avait d’autres grapheurs, Nestor, qui m’a fait rencontrer Lek, très connus aujourd’hui ; ils m’ont beaucoup influencé. A cette époque je signais Anoze… Nous avons formé un groupe baptisé la Team VF, on travaillait en vandales, sur des trains, des dépôts… L’autre chance c’est d’avoir eu une professeur d’arts plastiques merveilleuse, Claudie Laks, qui nous a ouvert les yeux sur toutes les formes d’art. On l’aimait beaucoup. Il nous est même arrivé de lui dédicacer notre travail. Elle s’intéressait à ce qu’on faisait en gardant un œil critique. Un jour elle nous a reproché de ne pas regarder les endroits où l’on graphait, la matière des supports, de ne pas tenir compte des ambiances. A partir de là j’ai complètement changé ma manière de voir le street art. »

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Jo Di Bona en pleine action…

« Je n’avais aucune conscience de la scène actuelle »

Le graff n’est qu’un aspect du parcours de Jo Di Bona. Il écrit des recueils de poésie, des pièces de théâtre, s’engage dans des études d’art dramatique, compose et écrit des chansons, et tombe dans la musique, jusqu’à former un groupe rock,Hôtel. « J’avais l’impression que le street art ne débouchait sur rien… J’ai laissé tomber la peinture. Plus le temps et plus trop l’envie. A cette époque les grapheurs étaient traqués, il n’y avait aucune reconnaissance du public et les amendes, la prison, c’était dissuasif… « Hôtel » a marché fort, très vite. Sur internet, en live. Tout ça a duré 13 ans. Jusqu’au jour où le groupe s’est dissous. En 2012, je suis retourné à la peinture, un peu par défaut. Plus rien d’autre ne m’accrochait. A Noël j’ai offert une de mes toiles à Amélie, qui est devenue ma compagne et mon agent. Elle m’a demandé d’en faire trois ou quatre autres pour les proposer à une galerie d’art contemporain. Je pensais que ça n’allait pas marcher, je n’avais aucune conscience de la scène actuelle. Ces toiles ont été exposées avec celles des plus grands grapheurs new-yorkais et elles se sont vendues. C’est comme ça que tout a commencé. Finalement, cette coupure de 13 ans a été bienfaisante, j’avais acquis un style né de toutes mes expériences, y compris celles de la musique ».

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Le hasard, encore lui, a amené Jo Di Bona à Decazeville, un matin d’été 2016, alors qu’il était en vacances à Pruines dans sa belle-famille. Il avait repéré un mur comme il les aime, un mur qui respire, qui parle des gens, avec sa patine de citée minière endormie. Il a commencé à poser les couleurs du gorille devenu emblème du street art à Decazeville. « Des policiers sont arrivés. Ils n’avaient pas envie de rigoler ! Je suis resté respectueux, je leur ai expliqué, j’ai montré avec mon smartphone ce que je faisais un peu partout dans le monde. Ils ont appelé un adjoint de la mairie qui m’a autorisé à finir mon gorille. Nous avons gardé le contact. Decazeville communauté pensait déjà organiser un festival street art sur son territoire, quand ils m’ont demandé d’être le parrain de Mur Murs j’ai accepté tout de suite. »

Decazeville Communauté, Jo et Amelie ont convaincu des artistes de les accompagner pour le plus grand festival de street art d’Occitanie. « Aucun n’a refusé. Ça a été facile de les convaincre, je leur ai raconté la cité minière, ces murs qui disent tant de choses, ces surfaces que l’on recherche pour les colorer et les faire vivre, et ces gens qui m’ont accueilli. »

Jo Di Bona est réclamé partout. Après sa fresque « La Liberté guidant le peuple », en hommage aux victimes des attentats de Paris parue en couverture du New York Times, les portes des galeries internationales se sont ouvertes, une de ses œuvres a été exposées par l’ONU à son siège de New York. A sa carte de visite qui comprend, entre autres, Paris, New York, Londres, Miami, Hong Kong, Madrid… il peut maintenant rajouter Decazeville. La classe.

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